Éleuthérocoque

Éleuthérocoque



Noms communs : Éleuthéro, éleuthérocoque, ginseng de Sibérie.
Nom botanique :
Eleutherococcus senticosus, anciennement Ancathopanax senticosus, famille des araliacées.
Noms anglais :
Siberian ginseng, eleuthero.
Nom chinois :
Ci Wu Jia.

Parties utilisées : La racine et, plus rarement, les feuilles.
Habitat et origine :
Originaire de la Sibérie et du nord de la Chine, cet arbuste est de la même famille (araliacées) que le ginseng (Panax ginseng et Panax quinquefolius), mais d'un genre botanique différent. Plante forestière qui tolère des climats plus froids que ses cousins, l'éleuthérocoque colonise les forêts mixtes situées au-delà de la limite géographique du Panax ginseng.

Indications

Efficacité incertaine

Améliorer les performances sportives; traiter l’herpès, réduire la fatigue; stimuler le système immunitaire.

Usage reconnu

Tonifier l'organisme en cas de fatigue, de faiblesse, lorsque la capacité de travail et de concentration diminue ou durant une convalescence.

Voir la légende des symboles

Usage traditionnel

Stimuler l'appétit et les défenses immunitaires; combattre la fatigue et le stress, augmenter la mémoire et le bien-être général.

En médecine traditionnelle chinoise – Soutenir la santé des personnes âgées.

Posologie de l’éleuthérocoque

  • Infusion. Infuser de 2 g à 4 g de racine séchée dans 150 ml d'eau bouillante. Boire 1 ou 2 tasses par jour.
  • Racine séchée en capsules ou comprimés. Prendre de 0,5 g à 4 g de poudre de racine séchée par jour, en 2 ou 3 doses.
  • Teinture (1:5). Prendre de 10 ml à 20 ml par jour, en 2 ou 3 doses.
  • Extrait fluide (1:1). Prendre de 2 ml à 4 ml par jour, en 2 ou 3 doses.
  • Extrait solide (20:1). Prendre de 100 mg à 200 mg par jour, en 2 ou 3 doses.

Notes
-
Il est généralement recommandé de prendre toutes les 6 à 12 semaines une pause thérapeutique de 1 à 2 semaines.
- La teneur en ingrédients actifs des préparations peut varier beaucoup (voir la section Sur les tablettes)

Historique de l’éleuthérocoque

Les Chinois, qui font grand usage de plantes de la famille des araliacées, connaissent l'éleuthérocoque depuis environ 4 000 ans. Ils attribuent à sa racine le pouvoir d'accroître la longévité, d'améliorer l'appétit et la mémoire et, de manière générale, de contribuer à la santé.

ÉleuthérocoqueLes Russes, quant à eux, n'ont « découvert » l’éleuthérocoque qu’en 1855 lorsque 2 scientifiques l'ont identifiée pour la première fois au cours d'un voyage dans le nord du pays. Cependant, ils s'y sont vraiment intéressés vers la fin des années 1950 seulement. Ils cherchaient des produits de remplacement économiques pour le rare et très cher ginseng, victime d’une cueillette excessive. Ils ont alors fait de nombreuses études cliniques sur cette plante, principalement pour vérifier ses effets adaptogènes.

Le concept d'« adaptogène » a été élaboré dans les années 1950 par 2 scientifiques russes (Lazarev et Brekhman) Selon eux, une substance adaptogène accroît de manière générale (non spécifique) la résistance de l'organisme aux divers stress qui l'atteignent. Tout en provoquant un minimum d'effets indésirables, un adaptogène exerce une action régulatrice non spécifique sur de nombreux organes ou fonctions physiologiques (voir notre fiche Ginseng). On a découvert à cette époque que l'éleuthérocoque renfermait des éleuthérosides, substances aux propriétés similaires à celles des ginsénosides du ginseng. Les 2 plus abondants sont les éleuthérosides E et B.

L’éleuthérocoque ayant la réputation d’accroître les performances sportives, il est devenu très populaire auprès des athlètes de l’Union soviétique. Il a commencé à être utilisé comme plante médicinale en Europe de l'Ouest et en Amérique du Nord vers 1975.

L'éleuthérocoque, est parfois encore appelé « ginseng de Sibérie », mais du point de vue botanique, cette appellation est erronée.

Recherches sur l’éleuthérocoque

Beaucoup d’essais cliniques non contrôlés ont été menés sur l’éleuthérocoque en Union soviétique à partir des années 1950 et ont été publiés en russe. Leurs résultats, compilés dans des synthèses publiées en anglais dans les années 1980, pointent notamment vers un effet adaptogène (amélioration de la résistance au stress), ergogénique (amélioration de la performance et de l’endurance physique) et immunostimulant. Mais ces données n’ont pas été confirmées par des essais cliniques répondant aux critères actuels de la médecine fondée sur les preuves.

Le concept de substance adaptogène, bien que fort intéressant, s'insère mal dans le contexte de la recherche médicale moderne et est plus ou moins compatible avec les protocoles qui ont habituellement cours dans les études cliniques1. Ce qui pourrait d'ailleurs expliquer les incohérences et les contradictions que les divers essais cliniques ont révélées.

Efficacité incertaine Performances physiques. Des chercheurs soviétiques ont mené, dans les années 1960, de nombreux essais cliniques qu'ils ont qualifiés de positifs. Cependant, plusieurs études plus récentes et de meilleure qualité méthodologique n’ont pas été concluantes, tant auprès de sportifs ordinaires que d’athlètes en situation d’entraînement intensif.2,3.

Efficacité incertaine Herpès génital. Une étude à double insu avec placebo portant sur 93 sujets souffrant de crises récurrentes d'herpès génital indique que l'éleuthérocoque (2 g par jour) a réduit le nombre de crises des participants4.

Efficacité incertaine Fatigue. Au cours de 2 essais auprès de personnes fatiguées, l’éleuthérocoque n’a pas fait mieux, ou à peine mieux, qu’un placebo pour améliorer la vitalité des participants5,6.

Efficacité incertaine Stimulation du système immunitaire. Les résultats d'essais in vitro indiquent que l'extrait des racines de la plante a une activité antivirale à large spectre7, mais les données sur les humains ne sont pas convaincantes : certaines ont permis de constater un effet immunomodulateur, mais on n’a pas mesuré la résistance des sujets aux infections8,9. De plus, un essai sur 30 athlètes n’a pas été concluant au chapitre de la stimulation immunitaire des participants après 6 semaines de supplémentation10. Seul un essai clinique mené en ex-Union soviétique auprès de 1 000 travailleurs fait état d’une réduction marquée du nombre de jours d’absence pour cause de maladie11, mais nous ne disposons d’aucun détail concernant la qualité méthodologique de cette étude11.

Par ailleurs, la racine d'éleuthérocoque entre dans la composition d'une préparation à base d'andrographis (Kan Jang®, 85 % d’andrographis, 10 % d’éleuthérocoque) qui est destinée au traitement des infections des voies respiratoires et qui a fait ses preuves dans des essais cliniques12-14 (voir notre fiche andrographis pour en savoir plus sur ce produit). Une autre préparation renfermant entre autres plantes de l’éleuthérocoque a donné de bons résultats comme adjuvant en cas de pneumonie15 et dans le traitement d’infections des voies respiratoires supérieures16. Cependant, on ne peut pas conclure à l’efficacité de l’éleuthérocoque seul sur la base de ces essais.

Usage reconnu Fatigue, difficulté de concentration, convalescence. La Commission E et l’OMS reconnaissent l'éleuthérocoque comme un tonique qui peut soutenir et stimuler l'organisme en cas de fatigue et de faiblesse, lorsque la capacité de travail ou de concentration est amoindrie ou au cours d'une convalescence.

Précautions

Attention

  • Il peut arriver que chez les personnes atteintes d'athérosclérose ou de cardite rhumatismale, l'éleuthérocoque provoque des palpitations, de la tachycardie et une élévation de la tension artérielle.
  • L'éleuthérocoque peut augmenter le taux de sucre dans le sang après un repas17. Avertir son médecin, afin qu'il puisse, au besoin, revoir la posologie des médicaments hypoglycémiants classiques.

Contre-indications

  • La Commission E recommande d'éviter de prendre de l'éleuthérocoque en cas de tension artérielle élevée (plus de 180/90).
  • Traditionnellement, on déconseille l'éleuthérocoque aux enfants de moins de 12 ans ainsi qu'aux femmes enceintes et à celles qui allaitent.

Effets indésirables

  • Aux doses recommandées, l'éleuthérocoque est virtuellement dénué d'effets indésirables. Rarement : diarrhée temporaire, troubles du sommeil.

Interactions

Avec des plantes ou des suppléments

  • Aucune connue.

Avec des médicaments

  • Selon un essai clinique sur des sujets en bonne santé, l’éleuthérocoque n’interagirait pas avec les médicaments, car il n’a pas d’effet activateur ou inhibiteur de l’activité des cytochromes. Ces derniers sont des enzymes-clés dans le métabolisme des médicaments18.
  • Théoriquement, les effets de la racine de l'éleuthérocoque pourraient s'ajouter à ceux des médicaments hypoglycémiants, hypotenseurs ou hypertenseurs.

Sur les tablettes

Selon les auteurs d’une analyse de 25 préparations, la teneur en substances actives peut varier considérablement d'un produit à l'autre et ils recommandent, par conséquent, que les produits soient normalisés19.

Bien que certains fabricants étiquettent encore leurs suppléments d'éleuthérocoque, « ginseng de Sibérie », du point de vue botanique, cette appellation est erronée.

Certains produits s’affichant sous le nom « ciwuja » sont généralement de l’éleuthérocoque (Ci Wu Jia est le nom chinois de la plante)

 

 

Références

Note : les liens hypertextes menant vers d'autres sites ne sont pas mis à jour de façon continue. Il est possible qu'un lien devienne introuvable. Veuillez alors utiliser les outils de recherche pour retrouver l'information désirée.

Bibliographie

Barnes Joan, Anderson A. Linda, Phillipson David J. Herbal Medicines, Pharmaceutical Press, Grande-Bretagne, 2002, 2e édition.
Blumenthal M (Ed). The ABC Clinical Guide to Herbs, American Botanical Council, États-Unis 2003.
Mills S, Bone K. Principles and Practice of Phytotherapy, Churchill Livingstone, Harcourt Publishers, Grande-Bretagne, 2000.
National Library of Medicine (Ed). PubMed, NCBI. [Consulté le 25 novembre 2009]. www.ncbi.nlm.nih.gov
Natural Standard (Ed). Herbs & Supplements - Eleutherococcus senticosus, Nature Medicine Quality Standard. [Consulté le 29 octobre 2009]. www.naturalstandard.com Pizzorno JE Jr, Murray Michael T (Ed). Textbook of Natural Medicine, Churchill Livingstone, États-Unis, 1999.
Schulz V, Hänsel R, Tyler VE. Rational Phytotherapy - A Physicians' Guide to Herbal Medicine, fourth edition, Springer, Allemagne, 2001.
The Natural Pharmacist (Ed). Natural Products Encyclopedia, Herbs & Supplements – Eleutherococcus senticosus, ConsumerLab.com. [Consulté le 29 octobre 2009]. www.consumerlab.com
Therapeutic Research Faculty (Ed). Siberian Ginseng, Natural Medicines Comprehensive Database. [Consulté le 29 octobre 2009]. www.naturaldatabase.com

Notes

1. Davydov M, Krikorian AD. Eleutherococcus senticosus (Rupr. & Maxim.) Maxim. (Araliaceae) as an adaptogen: a closer look.J Ethnopharmacol 2000 Oct;72(3):345-93.
2. Goulet ED, Dionne IJ. Assessment of the effects of eleutherococcus senticosus on endurance performance. Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2005 Feb;15(1):75-83.
3. Ginseng: is it in the root? Palisin TE, Stacy JJ. Curr Sports Med Rep. 2006 Jun;5(4):210-4. Review.
4. Williams M. Immuno-protection against herpes simplex type II infection by eleutherococcus root extract. Int J Alt Complement Med. 1995;13:9-12. Étude mentionnée dans : The Natural Pharmacist (Ed). Natural Products Encyclopedia, Herbs & Supplements - Ginseng, ConsumerLab.com. [Consulté le 24 janvier 2006]. www.consumerlab.com
5. Cicero AF, Derosa G, et al. Effects of Siberian ginseng (Eleutherococcus senticosus maxim.) on elderly quality of life: a randomized clinical trial. Arch Gerontol Geriatr Suppl. 2004;(9):69-73.
6. Hartz AJ, Bentler S, Noyes R et al. Randomized controlled trial of Siberian ginseng for chronic fatigue. Psychol Med. 2004 Jan;34(1):51-61.
7. Glatthaar-Saalmuller B, Sacher F, Esperester A. Antiviral activity of an extract derived from roots of Eleutherococcus senticosus.Antiviral Res 2001 Jun;50(3):223-8.
8. Bohn B, Nebe CT, Birr C. Flow-cytometric studies with eleutherococcus senticosus extract as an immunomodulatory agent. Arzneimittelforschung. 1987 Oct;37(10):1193-6.
9. Szolomicki J, Samochowiec L, et al. The influence of active components of Eleutherococcus senticosus on cellular defence and physical fitness in man.Phytother Res 2000 Feb;14(1):30-5.
10. Gaffney BT, Hugel HM, et al. The effects of Eleutherococcus senticosus and Panax ginseng on steroidal hormone indices of stress and lymphocyte subset numbers in endurance athletes. Life Sci. 12-14-2001;70(4):431-442. 9.
11. Étude mentionnée dans : Mills S, Bone K. Principles and Practice of Phytotherapy, Churchill Livingstone, Harcourt Publishers, Grande-Bretagne, 2000, page 538.
12. Melchior J, Spasov AA, et al. Double-blind, placebo-controlled pilot and phase III study of activity of standardized Andrographis paniculata Herba Nees extract fixed combination (Kan jang) in the treatment of uncomplicated upper-respiratory tract infection.Phytomedicine 2000 Oct;7(5):341-50. Texte intégral : www.shi.se
13. Gabrielian ES, Shukarian AK, et al. A double blind, placebo-controlled study of Andrographis paniculata fixed combination Kan Jang in the treatment of acute upper respiratory tract infections including sinusitis.Phytomedicine 2002 Oct;9(7):589-97. Texte intégral : www.shi.se
14. Spasov AA, Ostrovskij OV, et al. Comparative controlled study of Andrographis paniculata fixed combination, Kan Jang and an Echinacea preparation as adjuvant, in the treatment of uncomplicated respiratory disease in children. Phytother Res. 2004 Jan;18(1):47-53. Texte intégral : www.shi.se
15. Narimanian M, Badalyan M, et al. Impact of Chisan (ADAPT-232) on the quality-of-life and its efficacy as an adjuvant in the treatment of acute non-specific pneumonia. Phytomedicine. 2005 Nov;12(10):723-9.
16. Narimanian M, Badalyan M, et al. Randomized trial of a fixed combination (KanJang) of herbal extracts containing Adhatoda vasica, Echinacea purpurea and Eleutherococcus senticosus in patients with upper respiratory tract infections. Phytomedicine. 2005 Aug;12(8):539-47.
17. Sievenpiper JL, Arnason JT, et al. Decreasing, null and increasing effects of eight popular types of ginseng on acute postprandial glycemic indices in healthy humans: the role of ginsenosides. J Am Coll Nutr 2004;23:248-58.
18. Donovan JL, DeVane CL, et al. Siberian ginseng (Eleutheroccus senticosus) effects on CYP2D6 and CYP3A4 activity in normal volunteers. Drug Metab Dispos. 2003 May;31(5):519-22. Texte intégral : http://dmd.aspetjournals.org
19. Harkey MR, Henderson GL, et al. Variability in commercial ginseng products: an analysis of 25 preparations.Am J Clin Nutr 2001 Jun;73(6):1101-6.